Témoignages de parents

Coralie, en parcours PMA avec don de gamètes

Coralie, en parcours PMA avec don de gamètes

Je m’appelle Coralie et j’ai commencé les examens pour une PMA avec don il y a un an et demi.

Ma FIV est aujourd’hui planifiée pour juillet mais j’ai décidé de la faire à l’étranger là où les dons ne sont pas anonymes.

L’accès aux origines a toujours été pour moi un point primordial dans la mesure où je veux laisser à mon enfant la possibilité de savoir d’où il vient.

C’est un choix très personnel que j’ai la chance de pouvoir me permettre car en France, malheureusement, ce n’est pas encore tout à fait ça.

Le donneur transmet la moitié de son patrimoine génétique à l’enfant et ce point d’interrogation, cette pièce inconnue, ne pose pas les mêmes questions à chaque enfant et à chaque adulte devenu grand.

En France, la politique du don anonyme a longtemps primé cependant ce principe ne respectait pas le droit aux origines ce qui a valu à notre pays une injonction au changement.

À partir de septembre 2022, tous les donneurs devront donc accepter de communiquer leurs informations identifiantes aux enfants issus de leurs dons.

Cette nouvelle banque de gamètes ne sera cependant pas utilisée tout de suite et les enfants, une fois majeurs, devront passer par une commission qui contactera le donneur pour savoir s’il souhaite communiquer son identité.

Mais qu’en est-il de l’enfant qui demandera ces informations et à qui le donneur répondra  »non » ? Je pense que les donneurs devraient être interrogés aujourd’hui et non dans 18 ans afin que les familles puissent prendre des décisions éclairées et expliquer les choses clairement à l’enfant.

Pour moi, un peut être a la possibilité d’être destructeur.

Je salue les progrès de la France car la loi progresse mais à mon sens, cela laisse un peut être qui ne devrait pas exister.

Bernard, papa de deux enfants conçus par don de sperme

Bernard, papa de deux enfants conçus par don de sperme

Je suis un père de deux enfants âgés respectivement de 18 et 16 ans.

Avec mon épouse, nous avons choisi d’entreprendre les démarches de PMA en faisant appel à l’IAD (insémination artificielle avec donneur) en 2003 puisque nos tentatives étaient infructueuses.

Ce fut un parcours du combattant, mais finalement, suite aux dons de gamètes, encadrés par le CECOS de Rennes, nous fûmes heureux d’accueillir ces deux petits anges.

Nous aurions aimé à l’époque, donner aux futurs bambins en devenir la possibilité à leur majorité, de connaître leurs géniteurs.

Nous ne leur avons jamais caché leur conception. Depuis leur naissance, nous leur avons expliqué avec des mots simples la manière dont ils sont venus au monde.

Actuellement, ils nous ont indiqué qu’ils souhaiteraient connaître leurs donneurs pour découvrir leurs origines mais ne souhaitent en aucune manière me remplacer. Ils me le montrent chaque jour.

Nous sommes évidemment disponibles pour les accompagner dans cette aventure.

Ils parlent librement de ce sujet sans tabou à la maison et semblent vivre une existence épanouie.

Karine, maman de jumeaux conçus par don

Je suis maman de jumeaux conçus par un don de sperme. Mes enfants savent comment ils ont été conçus ; je leur ai dit la vérité lorsqu’ils ont eu 8 ans.

Je ne pouvais plus leur mentir, impossible. Les mensonges ne se limitent pas qu’aux enfants en général, on cache aussi souvent la vérité aux proches. Combien de fois ai-je entendu : « Ils ressemblent à leur père. »  Et devoir mentir, c’est lourd et difficile. Alors j’ai tout dit, et ce fut une libération.

Voilà, je suis une maman heureuse, heureuse d’avoir eu mes enfants grâce à ce donneur, et  je souhaite de tout cœur que la loi avance car un de fils m’a dit qu’à ses 18 ans il ferait ce que la loi lui permettrait pour connaître ses origines.

Je pense que l’accès aux origines est nécessaire pour tous ces enfants qui souhaitent savoir d’où ils viennent. Ne pas savoir est source de déséquilibre émotionnel et cela devient un combat de toute une vie.

Adèle : maman de Julia née en 1985 d’un don de sperme

Les postures des opposants à l’accès aux origines sont révoltantes. Je suis sûre que moins les arguments sont valables plus les lobbying sont puissants.

Nous avons de très beaux arguments : les témoignages des donneurs sensibles à la souffrance des enfants issus de dons de gamètes, et ceux de ces enfants qui ont subi une double peine: le secret de leur conception et le secret de leurs origines.
Une fois levé le premier, reste le second et là ils se retrouvent face au néant. Comment se construire sur du rien?

Nombre de ces enfants ont eu besoin d’accompagnement psychologique, mais qui résout quoi ?

Nombre d’entre eux ont été confrontés à la maladie et la médecine accepte de leur fournir une sous-prise en charge en l’absence de 50% d’antécédents familiaux.
C’est de la discrimination.
Devant un risque ne devrait-on pas appliquer le principe de précaution ?
Par ailleurs, comment vivre avec la moitié de soi non incarnée ? La fille du congélateur ou de l’azote liquide ?

Chantal : maman de 4 enfants issus d’une IAD

Je suis maman de 4 enfants issus d’une IAD.

Nous avions décidé d’être parents. J’avais 20 ans. J’imaginais cet enfant issu d’un beau couple….et cet enfant imaginaire il a fallu en faire le deuil. Il y avait deux solutions : l’adoption ou l’ insémination avec donneur. Mon mari a mal vécu l’annonce de son infertilité et à ce moment là ne voulait pas entendre parler d’IAD.

Enfin, 5 ans plus tard, d’un commun accord, nous avons débuté les I.A.D. Nous avons eu un petit garçon en 1983 à la 6ième tentative d’IAD. Notre second garçon est né en 1986 à l’issue de la 2ième tentative d’IAD. Nos jumeaux sont nés ensuite en 1990 à la première tentative.
En 1994, après 19 ans de mariage et un parcours difficile, mon mari est parti.
Nous avons divorcé. Mon plus grand bonheur était la naissance de mes enfants et construire une famille. Le jour où tout s’écroule vous avez envie de revenir à la case départ. Si pendant plusieurs années j’ai souffert et élevé seule mes enfants, je suis sereine à présent. Mon ex mari est en bons termes avec ses enfants. J’ai annoncé aux deux grands d’où ils venaient. Mon ex ne voulait pas, mais plus les enfants grandissaient et plus ce secret me pesait jusqu’à l’obsession et la dépression. La semaine dernière je l’ai appris aux jumeaux. Ma fille a pleuré. Elle a été choquée. Mon fils m’a dit « je suis moi » et même si tu m’avais appris que je suis un enfant adopté ça me serait égal. Par contre ils se demandent à quoi ressemble le donneur. Mon aîné avait 12 ans lorsque je lui ai annoncé son mode de conception. Il m’a dit: « le donneur c’est un con » … réaction à une souffrance ? Mon second fils a dit « mon père c’est mon père ».
Je souhaite de tout mon cœur que l’anonymat des donneurs soit levé. les psychothérapeutes parlent beaucoup de psychogénéalogie , du poids des secrets, des non dits pour les générations à venir. Je crois beaucoup à cela. Je suis infirmière et me suis formée. Mes enfants sont heureux aujourd’hui mais le seront ils toujours, amputés d’une partie de leurs racines biologiques ?

Je remercie tous les donneurs. Leur acte de générosité rend des couples et des enfants « presque » heureux car désirés. Dommage pour l’ombre au tableau…mensonges et hypocrisie faussent les relations familiales. Tant de souffrances pourraient être évitées….

Messieurs qui faites les lois, si vous vous mettiez à notre place ?


Au plus loin de mes souvenirs, j’ai parlé de la conception du premier enfant à ma sœur et mon frère. Je n’ai perçu aucune compassion . Mon frère en a eu pour mon ex– mari . Pour moi le sentiment de honte s’installait sournoisement. Ce sujet était tabou il fallait faire comme si notre famille était une famille normale.
Avec mon ex– mari nous n’en parlions pas . Et pourtant nous avons désiré un troisième enfant (et je me disais qu’un jour ils seront plusieurs à partager le secret ). Avec le traitement de stimulation ovarienne j’avais 3 follicules mûrs : à 1 mois de grossesse, j’ai fais une fausse couche et il me restait 2 embryons . J’ai accouché des jumeaux à terme. Mon garçon avait un nævus important sur le thorax, la sage femme a dit à mon ex: vous l’avez aussi? petit rappel qu’une tierce personne faisait partie de la famille. J’étais débordé par les tâches de toute mère au foyer et lorsque les bébés ont eu trois mois mon ex a commencé à « se déconnecter » de notre famille . Je me trouvais seule le plus souvent et très mal: ma culpabilité grandissait, d’autant qu’un soir il m’a regardé et dit « 4 comme ça ! ». …en hochant la tête. Pourquoi ai–je eu l’impression de devoir porter seule cette culpabilité ? Au point ( à un moment d’intense tristesse ) de vouloir en finir avec moi et avec ce que j’avais de plus cher au monde mes enfants: enfants nés avec une partie d’eux qu’il fallait nier.

Chaque maillon de la chaîne est responsable : parents, donneurs, C.E.C.O.S, législateur.

Chacun voit midi à sa porte et il est facile de décider avant la conception de l’enfant.

L’instinct de survie a toujours été le plus fort chez moi, j’ai consulté. Un médecin venait nous parler , tenter d’aider notre couple mais ce fut inutile. Des angoisses remontent pendant que je vous écris. Je ne pouvais pardonner à mon ex ses infidélités. Il fuyait.

Je peux expliquer cette culpabilité maintenant. Au C.E.C.O.S on m’a demandé qu’allez vous dire à votre enfant ? j’ai répondu il ne le saura pas, je ne veux pas le perturber, mon mari aussi, nous étions au diapason. Et les C.E.C.O.S savent camoufler les mensonges: couleur des yeux, cheveux, jusqu’au groupe sanguin identique au père. Les enfants ont grandi, moi j’ai repris mon travail d’infirmière. J’ étais mieux après le divorce. Seulement je me suis intéressée après une formation en alcoologie à la psychogénéalogie, au génogramme. J’ai dit à la formatrice ma préoccupation concernant les jumeaux qui ne savaient pas, elle m’a donné l’adresse d’un psychothérapeute je déprimais et lui, dédramatisait. Il me conseillait de le leur dire. Après quelques séances je lui expliquais l’impossibilité de le dire j’étais anxieuse et j’avais peur de leur réaction. Toujours » ce poids » d’avoir mal agi. C’était en 2005. Les conséquences auraient pu être dramatiques pour moi, obsédée par cela. J’ai voulu oublier. Hospitalisée j’ai pu enfin parler sans être jugée ,comprise enfin! je suis toujours en soins car devenue vulnérable. Maintenant les jumeaux savent , je crois que le moment était venu, et que surtout j’étais prête.

Je pense que chaque couple doit mûrir sa décision avec l’aide de psychologues , être mieux averti des conséquences pour les enfants qui ressentent les angoisses des parents, leur mal–être, leur famille différente….

Pour conclure et en revenir au côté humain , il y a le donneur, le père ,la mère chacun avec son individualité, son vécu et l’enfant qui naît, qui grandit devient adolescent, adulte qui demande » des comptes ». Comment pourrions nous tous faire la sourde oreille? Moi je ne le peux pas et j’ai encore un combat à mener pour être en paix avec moi même et vraiment bien avec mes enfants : Je veux qu’ils puissent connaître leurs origines s’ils le souhaitent. Rien n’est irrémédiable , enfin je l’espère.

Walter Merrick – UK

Walter Merrick - UK
Cher futur père IAD,
Comme vous, je ne m’attendais pas à me trouver dans cette situation. C’est un coup dur quand on vous dit que vous êtes stérile. Jusqu’à la fin de ma vie, je me souviendrai du jour; il y a fort longtemps, où les docteurs me l’ont annoncé de leur ton détaché. J’ai maintenant deux enfants conçus par IAD nés en 1983 et 1986,mais je me souviens toujours des sentiments qui m’ont frappé à ce moment là.

Qu’avons-nous fait pour mériter cela ? C’est si injuste, si cruel qu’il est possible que vous ne vouliez parler à personne de votre souffrance.
Parce que c’est la dernière chose que vous voudriez dire à quelqu’un, qui, de toute façon, peut être ne comprendrait pas. Un homme stérile. Une orange sans un seul pépin. Pas impuissant d’accord, mais quand même qui tire à blanc.
Vous avez entendu de nombreuses plaisanteries à ce sujet, et maintenant c’est de vous qu’on va se moquer. Il est impossible d’imaginer que vous pourrez encore faire figure d’homme si vos amis le savaient. Elle dit qu’elle ne vous méprise pas, mais comment savoir avec les femmes ? Maintenant qu’il est certain que je ne peux pas lui en donner, voudra-t-elle vraiment rester avec moi ?

Supposons que nous ayons un enfant par IAD, et alors ? Que vais-je ressentir ? Est-ce que je me rappellerais à chaque instant que cet enfant n’est pas de moi ?
Il va manquer quelque chose et ce sont mes gènes qui ont disparu. Je vais être la fin de la lignée. Il se peut que je me laisse convaincre d’avoir un bébé IAD et que je refoule ces sentiments pour lui faire plaisir, mais est-ce que j’aimerais cet enfant vraiment comme s’il était le mien ?

Bien, mon ami, Tout ce que je peux dire est que je suis passé par là !
On peut ressentir la perte de la fécondité comme un deuil.
Les émotions qu’elle éveille et le temps qu’il faut pour voir les choses sous leur vrai jour sont identiques. En toute logique, vous savez que vous n’avez aucune honte à avoir, mais émotionnellement, c’est tout à fait différent. Il est tout naturel que les sentiments de douleur et de tristesse ne disparaissent pas rapidement, mais nous apprenons à être partagés entre les sentiments de perte à cause des enfants que nous n’aurions jamais pu avoir et le sentiment d’excitation et de joie pour les enfants que nous avons.
Les enfants ne vous en aiment pas moins parce qu’il n’y a pas de liens génétiques entre vous. Vous êtes Papa. Vous êtes là, vous les élevez, jour aprés jour. Vous les entourez et les protégez tout comme tout autre pére. Et même peut-être plus, parce que vous et votre compagne avaient à réfléchir beaucoup plus que d’autres parents pour savoir pourquoi vous vouliez des enfants.

Les jeunes enfants à qui l’on parle de leur origine ne sont pas choqués par la nouvelle. Ils ne comprennent pas vraiment les implications.
Mais si vous le leur dites quand ils sont jeunes et, au fur à mesure qu’ils grandissent, vous leur donnez des renseignements supplémentaires, la nouvelle n’est jamais un choc, et quand ils seront adolescents ils ne se souviendront pas du moment précis où on leur a dit la vérité.

Nous savons tous que je ne suis pas lié à eux génétiquement, mais je n’ai pas honte de ma stérilité et ils le savent. Ils m’acceptent entiérement comme leur père en partie parce qu’ils n’en ont pas d’autre, et en partie parce que j’assume toutes les responsabilités et l’autorité qui accompagnent le rôle de père. Nous avons une relation ouverte et honnête et les enfants m’aiment et me respectent comme le père qui a été là pour eux dès le premier jour.

L’éventualité, qu’adultes, ils puissent rechercher leur donneur ne devrait pas vous dérouter ! Quoiqu’il arrive, vous êtes toujours Papa !

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Michelle

Lorsque ma fille est née, comme pour beaucoup d’autres mamans, ce fut le plus beau jour de ma vie.
Je n’en croyais pas mes yeux.
A presque 41 ans, j’avais enfin un enfant. Après tant de galères! 5 années à essayer de tomber enceinte, 6 FIV. Et puis, le mariage qui s’effrite, se dissout. Disparaît.
Merde ! Je fais quoi? Je fais quoi maintenant pour avoir un bébé ? Voilà. 41 ans, divorcée, sans enfant, sans mec. Coincée.
Alors, soit, je rencontre l’homme de ma vie dans cinq minutes, soit… Soit, et bien, on n’en parle plus. J’fais une croix dessus…
Mais rien de tout cela n’arriva. Pas d’homme dans ma vie, mais pas question d’abandonner. En en parlant un peu aux copines, je m’aperçois que je ne suis pas la seule dans cette situation. Par contre je suis la seule à être seule. Les autres sont en couple. On me donne une adresse. En Belgique. J’appelle illico. Je raconte encore.
« Vous êtes homosexuelle ? »
Non. Je suis seule.
« Bon, venez me voir ».
Je pars quelques jours plus tard. Je rencontre le professeur untel, un monsieur aux cheveux blancs qui… Qui quoi ?
Je ne sais plus. Comme par hasard, ce premier entretien est sorti de ma mémoire. Malgré tout, je repars pleine d’espoir. Ca, je m’en souviens.
Commencent alors les traitements, les prises de sang, les coups de fil pour les résultats, re-prises de sang, re-coups de fil.
Et puis, tout va très vite. Mes résultats sont bons. Je repars en Belgique, à l’hôpital. Seules deux amies très proches sont au courant et me soutiennent. J’arrive à l’hôpital, j’y passe la nuit. J’ai acheté du chocolat, je n’ai pas le droit, mais je mange la tablette entière en attendant le sommeil.
Le lendemain matin, départ au bloc pour une FIV avec sperme de donneur. Je suis seule, loin de ma famille et de mes amis. S’il m’arrive quelque chose…
Mais non, tout s’est bien passé. Quelques heures plus tard, je rentre à Paris. Je vais bien.
Quelques jours plus tard, je téléphone pour connaître les résultats. Ils sont excellents !!! Il y a 7 embryons ! 7, mon chiffre porte-bonheur !
Je retourne en Belgique pour le transfert d’embryon. Arrivée devant le train, j’hésite. J’hésite. Je sais que l’issue de ce voyage, si les résultats sont satisfaisants, est irrévocable.
Alors, j’hésite encore. Mais le train va partir. J’y vais. Je suis partie. Pour un long voyage avec ce « peut-être futur bébé » qui sera là pour la vie.

Je sais depuis le début que le donneur est anonyme. Mais mieux vaut anonyme que pas d’enfant du tout. De toutes façons, personne ne m’a dit qu’il y avait des donneurs non anonymes. Même ailleurs. Alors, j’ai pris ce que l’on m’a donné. Un enfant à tout prix. Personne ne m’a non plus prévenue pour plus tard.

Réimplantation. A l’hôpital, j’essaie de questionner le médecin qui s’occupe de moi.
– Vous savez qui est le donneur ? « Non, mais je peux vous assurer que ce n’est pas moi ! » dit-il en souriant. Je n’en saurai pas plus. La conversation est terminée.
Quelques heures plus tard, retour en province où j’habite encore un peu. Chaque jour, chaque minute, c’est l’angoisse. L’angoisse d’un nouvel échec, d’une maternité qui n’aboutit encore pas.

Pourtant, je dois me rendre à l’évidence. Je suis enceinte. Je n’y crois pas . Bien sûr, rien n’est acquis, il faut faire attention, à 40 ans, etc.
9 mois plus tard, ma fille est là. En pleine forme. Moi aussi.

Et tout va bien, jusqu’au jour où, du haut de ses trois ans et de sa petite voix, elle me dit : « Je veux voir mon papa ! »
Oh, merde ! J’avais oublié ! Je ne sais plus ce que j’ai bafouillé. Je suis tellement habituée à être seule avec elle que je ne m’étais même pas aperçue qu’il manquait quelqu’un. Tellement habituée à être 2 que je ne pense même pas que l’on pourrait être 3. Mais ma fille, elle, elle voit bien que, chez les autres, il y a des PAPAS. Ben oui, chez les autres, il y a des papas, et chez nous, il n’y en a pas. Depuis que ma fille est née, je n’ai pas rencontré de monsieur qui…
« Il est où, mon papa, maman ? J’aimerais bien le voir ».
– Je sais, mon ange, moi aussi. Mais, je vais te dire quelque chose de très important. Ecoute, je ne connais pas ton papa. Je voulais avoir une petite fille comme toi, mais toute seule, je ne pouvais pas, alors, je suis allée dans un hôpital et j’ai choisi de belles petites graines que le docteur a mises dans mon ventre et te voilà.
J’ai toujours voulu une magnifique petite fille comme toi et TU ES LA. Ne t’inquiètes pas. Tu as un papa. Tout le monde en a un. Et peut-être qu’un jour, on le rencontrera.

Ce fut difficile de dire tout cela, mais il était très important que la vérité soit dite.
Et puis, un psychologue a pris la relève car j’ai senti que je n’allais pas suffire.
Un jour, n’y tenant plus, j’ai téléphoné au médecin en Belgique et j’ai essayé d’avoir des renseignements sur ce papa inconnu. J’en ai obtenu. Sa taille, la couleur de ses yeux, son métier, sa situation familiale, son pays d’origine. Déjà pas mal.

Si je regrette d’avoir eu un enfant dans ces conditions ?
Oui, bien sûr, car on ne m’a rien dit sur les conséquences que cela pouvait avoir sur ma fille, qui risque peut-être plus tard de ne pas comprendre ma démarche, de m’en tenir rigueur et de le mal vivre.
Non, bien sûr, car je suis la maman la plus heureuse au monde et j’espère que ma fille le sera aussi.
Elle a des copains, des copines qui vivent avec un seul parent, alors, cela permet de relativiser sa situation.
Depuis, quand elle parle de son papa, c’est avec plus de sérénité, car elle sait où il vit et ce qu’il fait, c’est plus facile.

IL faut que les lois changent et que l’anonymat des donneurs soit levé.
Cette levée de l’anonymat est essentielle au bien-être de l’enfant. Savoir d’où l’on vient est primordial.

Olivia Montuschi – épouse de Walter Merricks

Olivia Montuschi - épouse de Walter Merricks
Quand mon compagnon et moi avons parlé d’avoir un enfant, ce n’était pas n’importe quel bébé que je voulais, mais un bébé à nous ! Peut-être même son bébé, à cause de ses beaux yeux bleus, sa façon de s’exprimer, sa patience! parce que nous nous aimions. Comment aurions-nous pu penser à l’impensable! envisager d’avoir un bébé par don de sperme. Voilà quelle était ma situation, il y a quelques années. Peut-être est-ce la vôtre maintenant. Aujourd’hui, nous sommes les parents de deux jeunes enfants conçus par différents donneurs. Ils sont aussi différents et merveilleux que n’importe quels frères et soeurs.
Le point final qui mit fin à nos espoirs d’avoir des enfants génétiquement liés à nous deux nous a été asséné de façon laconique par le médecin de l’hôpital, avant que mon mari n’ait eu le temps de remonter son pantalon : « Vous n’avez pas la moindre chance d’avoir des enfants. N’essayez pas d’avoir recours à des traitements de charlatans, ils ne marchent pas! Au revoir ». On ne nous a offert aucune alternative et il n’y avait aucun soutien psychologique. Nous sommes sortis en titubant dans les rues tristes et mornes de Londres, effondrés par le manque d’espoir, mais pas surpris. C’était écrit depuis le premier test sur le sperme pratiqué par notre médecin de famille.

Je m’étais demandée ce que je ressentirais à ce moment là. Serais-je en colère, triste, désespérée ou simplement déçue ? Est-ce que je l’aimerais toujours ? Comment pourrions-nous avoir des rapports et savoir que jamais un enfant ne serait conçu, quelque soit la peine que nous prenions pour prévoir le moment de nos rapports? (et oui, nous agissions mécaniquement dans notre effort de concevoir !).
Et, en fait, que ressent votre homme sur tout cela ? Je supposais qu’il devait se sentir très mal, peut-être un sous-homme, bien qu’il refusait de le reconnaître. Après des années, j’en suis venue à comprendre que le plus gros chagrin pour lui était l’interruption de la lignée familiale, bien qu’il ne puisse l’exprimer à ce moment là et peut-être ne le réalisait-il pas pleinement lui même. C’est différent pour chacun. On sait que de nombreux hommes supposent que nous n’allons plus les vouloir parce qu’ils ne peuvent livrer « la marchandise ». Bien qu’il soit vrai que la stérilité n’a AUCUN lien physique avec la sexualité ou la virilité, certains hommes se sentent tellement diminués qu’ils peuvent refuser toute relation sexuelle pendant un certain temps et/ou devenir temporairement impuissants après avoir appris qu’ils étaient stériles.
Si vous en êtes capable, donnez lui l’assurance qu’il a sa place dans votre lit aussi bien que dans votre coeur. Il est probable qu’ils se sentiront vulnérables mais seront incapables de demander attention et soutien ou ils les refuseront. Montrer à votre compagnon que vous comprenez et respectez ses sentiments et lui proposer un soutien affectueux (même s’il le trouve difficile à supporter) est la première étape pour faire face à ce que l’avenir vous réserve.

De nombreux couples à qui j’ai parlé disent que c’est juste au moment où ils auraient dû être très proches, qu’ils ne s’étaient jamais sentis aussi éloignés l’un de l’autre par ce qu’ils avaient le sentiment qu’ils n’étaient pas sur la même longueur d’onde. Il est vrai que la stérilité met les relations à rude épreuve Ceux qui en sont sortis et se sont sentis plus forts de ce fait, disent que le secret est que chaque partenaire se respecte en tant qu’individu qui a besoin de prendre son temps, à son rythme pour affronter ses sentiments. Il peut être utile aussi que chaque partenaire dise à l’autre ce dont il a besoin (de calme, d’espace, de parler, de collecter des renseignements) et soit prêt à négocier pour que tous les deux puissent obtenir satisfaction à certains de ces besoins. Pour moi, il m’a fallu une gestation de neuf mois après le diagnostic définitif de la stérilité de mon mari pour prendre la décision de poursuivre avec l’IAD. Pendant ce temps, chacun de nous souffrait parce que nous ne pouvions engendrer un enfant, mais nous ne parlions que rarement de ce que l’autre endurait.

Tenir les enfants au courant.
Si l’on fait le choix de ne plus cacher la stérilité, cela implique, d’après nous, qu’il ne faut rien cacher de leurs origines aux enfants.
Il est absolument vrai, qu’en tant que femme féconde, je n’ai jamais regretté d’avoir recours à l’insémination par donneur pour construire notre famille. Ma grande tristesse de ne pas avoir SON bébé s’est modifiée au cours des années et m’a donné un sentiment de satisfaction et de plénitude avec les enfants que nous avions. Au fil du temps, nous sommes devenus plus proches en tant que couple à cause des épreuves que nous avions traversées ensemble. En tant que mère, je ne peux imaginer ce que serait la vie si nous n’avions pas été « francs » avec eux dès leur enfance. Les relations que nous avons avec ces deux jeunes individus est intime et chaleureuse, entourée de respect et de sincérité mutuelles.
Ils sont merveilleux.

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