« (…)Si manifestement, les intérêts individuels des acteurs impliqués dans le processus de la PMA sont inégalement protégés, le Conseil d’Etat a jugé qu’« en interdisant la divulgation de toute information sur les données personnelles d’un donneur de gamètes, le législateur a établi un juste équilibre entre les intérêts en présence ». La justesse de cet équilibre est toutefois très discutable. Il semble plutôt que l’intérêt de l’enfant en quête identitaire soit sacrifié au profit de la continuité du système de la PMA (…).
L’impératif de sauvegarde de l’équilibre des familles sous-tend même un diktat de l’histoire personnelle de ces enfants issus de dons de gamètes, ainsi que l’illustre les propos pour le moins paternalistes et intrusifs du rapporteur public devant le tribunal de Montreuil, décrétant de façon assez péremptoire que l’histoire personnelle de la plaignante « ne provient pas d’un tube à essai. Non, elle s’est forgée grâce à ses parents, qui l’ont conçue, même si c’est par une voie peu traditionnelle, et qui l’ont élevée : c’est ça son histoire personnelle » (conclusions Irline Billandon).
Mais est-ce au droit de dicter ce qui relève de l’histoire personnelle de l’enfant qui subit les conséquences psychologiques découlant de son mode de conception ? N’est-on pas tout simplement en train d’assister à l’entérinement d’une réification de l’enfant, objet de désir des couples en quête de parentalité, dont les droits et intérêts sont subordonnés à ceux des acteurs qui, contrairement à lui, ont une certaine maîtrise de la situation grâce au principe de l’anonymat (parents et donneur) ? »
Source : Sylvia Lise-Bada, « Le principe de l’anonymat des donneurs de gamètes passe le cap du Conseil d’Etat » [PDF] in Lettre « Actualités Droits-Libertés » du CREDOF, 4 juillet 2013.