Ninon

Ninon
J’ai appris il y a de cela 21 jours que j’étais non pas un simple bébé éprouvette comme on me l’avait toujours dit, mais un bébé PMA.

Mon père m’a dit que si je voulais des renseignements sur le donneur, je pouvais, du moins il m’en donnait le droit. Quant à moi, ma première réaction a été de lui assurer que je ne voulais rien savoir et que j’étais comblée avec lui.

Or le lendemain et les jours suivants s’est installé en moi le désir et presque le besoin de connaître cette personne.

Je me suis rendue compte que si je me cherchais sans m’être encore trouvée, que si je souffrais de crises d’hypocondrie depuis quelques années c’était peut être parce qu’au fond de moi je sentais qu’il y avait un vide.

Une chose me révolte dans cette interdiction qui nous est faite : je peux comprendre que certaines personnes, que certains donneurs, ne veuillent pas que l’on s’introduise dans leur vie privée. Même si je considère cela comme irresponsable de leur part que de ne pas assumer la vie qu’ils ont contribué à créer, je trouve d’autant plus aberrant le fait que la politique de notre pays empêche des dizaines de demi–frères et demi–sœurs de se retrouver.

Il est étrange que les témoignages en parlent très peu, et peut être que c’est l’enfant unique qui parle ici, mais la première étape dans la levée de l’anonymat serait pour moi d’autoriser ces enfants à savoir qu’ils ont une filiation, qu’ils sont étroitement liés.

Pour rassurer nos opposants on pourrait leur affirmer que  » ces enfants entre eux, n’auront pas l’intention de mendier des héritages ou de souhaiter s’introduire dans une vie familiale déjà établie « .

Nous pourrions peut être ainsi se trouver, partager des penchants communs, comprendre ce qui est véritablement naturel (j’entends par là génétique) en nous, bref, nous pourrions nous aider à nous construire mutuellement.

Un dernier point est choquant et problématique dans cette politique Française. De nombreux pays, et notamment des pays Européens, ont déjà renoncé à l’anonymat du don de gamètes. On en vient à se demander l’intérêt d’une Europe si divisée où des pays semblent se narguer de leur évolution respective et où les Français sont honteux de voir que leur pays respecte si peu les droits fondamentaux humains.

Car certes, l’anonymat de la PMA touche les enfants nés sous X mais qu’en sera t–il quand ces enfants mettront eux même au monde des enfants ? N’est ce pas là perpétuer un manque, laisser s’agrandir un trou béant qui réside malgré eux dans la personnalité de ces futurs parents ? Les décisions purement théoriques que ces êtres humains prennent à notre place n’ont vraisemblablement pas le privilège de pouvoir comprendre la réalité de ces vies qu’ils ont contribué à créer. Il y a encore tellement de choses à dire, et tellement de choses à rétorquer à nos opposants qui semblent mener un combat de plus en plus stérile, un combat qui s’assèche au fur et à mesure que leurs arguments prennent un visage borné, intraitable et parfois provocateur.

Mais pour finir sur une touche littéraire, il est possible que certains d’entre nous se sentent liés à la Marianne de Marivaux qui souffre d’un véritable trouble identitaire car sa famille est morte, elle ne peut se revendiquer d’aucune lignée, elle n’a aucune certitude fondamentale et ne peut faire que des hypothèses sur sa nature profonde de sorte qu’elle est une véritable girouette trimbalée d’histoires en histoires.
http://pmanonyme.asso.fr/wp-admin/media-upload.php?post_id=195&type=image&TB_iframe=1
Quoique puisse en dire la biologie, l’intuition première de l’Homme est de constater qu’il a une lignée et une hérédité génétique qui lui est nécessaire pour fonder son identité