» Voir le visage de celui qui m’a donné la vie »

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Extrait du Télégramme du samedi 13 avril 2013:

Astrid, 33 ans, professeur des écoles, habite dans la région de Rouen.
C’est à 13 ans que sa mère lui a annoncé qu’elle était née d’un don de sperme anonyme, son père, à la suite d’un traitement médicamenteux, étant devenu stérile. Un acte prodigué dans une clinique privée.
« Depuis toute petite, j’avais conscience que je ne ressemblais en rien à mon père. Je me posais beaucoup de questions sur mes origines. Étais–je une fille adoptée ? C’est bizarre, mais j’en tirais comme une sorte de fierté. J’avais le sentiment d’être différente des autres. »
« Une ado peut tout imaginer »
Astrid ne regrette pas une seconde la confession de sa mère.
« C’était un secret de famille assez lourd à porter. Il était temps d’assainir la situation. Car une ado peut tout imaginer : qu’elle est le fruit d’une relation adultère ou d’un viol. Des choses qui peuvent être beaucoup plus traumatisantes qu’un don de sperme et une procréation médicalement assistée. »
Aujourd’hui, Astrid a le sentiment qu’on lui a volé une partie de sa personnalité. « Psychologiquement, c’est assez dur à gérer. Et puis on pense au patrimoine génétique qu’on nous a laissé. L’homme qui a fait ce don de sperme était–il porteur d’une maladie héréditaire ? Je n’en sais strictement rien. »
« Un tiroir fermé à double tour »
Il y a quelques mois, Astrid a tenté d’en savoir davantage sur ce donneur anonyme. « Je n’ai pas pu avancer. Car la gynéco qui a procédé à la PMA n’était plus en activité depuis longtemps. Aucune trace d’elle. Je pense que les dossiers ont été détruits. »
Astrid ne demande pas à être mise en contact physiquement avec ce donneur anonyme. « Je voudrais simplement voir une photo. Mettre un visage sur celui qui a permis de me donner la vie. Mon père, c’est mon père. C’est lui qui m’a élevé et je le sais. »
L’association Procréation médicalement anonyme se bat pour qu’à leur majorité, les enfants conçus grâce à un don de gamètes et d’embryons puissent demander à être mis en contact avec les donneurs. « Cette demande serait tout simplement relayée. À charge pour le donneur de l’accepter ou non. Ce qui est fou aujourd’hui, c’est que ces infos existent mais que le tiroir qui les contient reste fermé à double tour. »