Le Télégramme le 7 février 2011

image002       Interview d’Arthur Kermalvezen

«Né de spermatozoïde inconnu», Arthur Kermalvezen relate la difficulté à grandir avec une demi-identité génétique. Actuellement en grève de la faim, il se bat pour que la possibilité d’accéder à ses origines soit reconnue par la loi française. Photo Philippe Dobrowolska En grève de la faim depuis mercredi dernier, Arthur Kermalvezen, âgé de 27 ans, se bat pour lever l’anonymat du don de gamètes. Il souhaite que la question soit débattue lors de l’examen du projet de révision des lois bioéthiques. Arthur Kermalvezen est né de spermatozoïde inconnu. Et comme 50.000 enfants issus d’une insémination artificielle avec donneur (IAD) depuis 1973, en France, il n’a pas accès à la totalité de ses origines. Ainsi le veut la loi qui impose l’anonymat aux donneurs de gamètes. Pour le droit d’accès aux origines La possibilité d’accès aux origines, dont Arthur Kermalvezen a fait son combat, devait être au coeur du projet de révision des lois bioéthiques, examiné, à partir d’aujourd’hui, à l’Assemblée nationale. Depuis mercredi dernier, 18h, après l’annonce du rejet de cette proposition gouvernementale par les députés de la commission spéciale, le jeune homme âgé de 27 ans a entamé une grève de la faim: «Je suis né grâce à une IAD, rendue possible car la loi l’a autorisée, oubliant au passage de penser aux conséquences pour les enfants. Aujourd’hui, la donne est différente, puisque les enfants sont là ! La loi doit changer au nom de notre droit d’avoir accès à nos origines». Porte-parole de l’association PMA (Procréation médicalement anonyme), il milite donc, depuis 2006, pour la levée de l’anonymat à 18 ans. Et expose régulièrement son histoire: un père stérile; des parents qui trouvent dans l’IAD une solution pour donner naissance à trois enfants, tous issus de donneurs différents; le secret d’une conception longtemps ignorée de son entourage; sa difficulté à grandir avec une demi-identité génétique… À cette demande d’avoir la possibilité de connaître son géniteur, ses contradicteurs avancent des arguments pratiques et éthiques, comme une éventuelle chute des dons, un renforcement du secret de la conception ou encore une crainte que le biologique prenne le pas sur l’affectif et l’éducatif. «Avec mes soeurs, nous l’avons toujours su, rétorque-t-il. J’ai dû grandir en faisant le deuil d’un père qui n’est pas mon géniteur. Et, quelque part, il y a un géniteur, sans visage, dont je dois faire le deuil parce qu’il n’est pas mon père». Si certains peuvent penser qu’Arthur Kermalvezen, en cherchant un géniteur, cherche aussi un père, il répond qu’il en a un: Henri, originaire de Guémené-Penfao (44), qui a d’ailleurs été un de ses premiers soutiens. «C’est l’homme que j’ai toujours appelé papa. Je ne cherche pas une vie de famille. J’en ai une, qui me convient. Une famille, n’est-ce pas la famille sociale, éducative et juridique?». Mettre un visage humain sur une entité Que cherche-t-il alors? «À mettre un visage humain sur une entité qui, pour l’instant, n’est personne et qui, pourtant, est omniprésente. À ne plus avoir ainsi à me demander si telle personne croisée dans le métro n’est pas mon géniteur». À cela s’ajoute une autre angoisse, celle de la rencontre incestueuse puisqu’à partir d’un don, dix conceptions sont possibles. Et une autre énigme à résoudre, celle de ses antécédents familiaux pour se constituer un dossier médical. Dans la dernière ligne droite de son combat, ArthurKermalvezen souhaite être entendu: «Cette question mérite d’être soumise à la représentation nationale. J’espère que le gouvernement défendra son projet de loi pour que nous n’ayons pas à saisir la Cour européenne des droits de l’Homme, dont la jurisprudence garantit à chacun le droit de connaître ses origines». «Né de spermatozoïde inconnu», d’Arthur Kermalvezen avec Blandine de Dinechin, J’ai lu. www.pmanonyme.asso.fr

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