Bill CORDRAY – USA – né en 1945

bill Cordray
La définition d’adopté ne me correspond pas réellement.
Mes parents ne m’ont pas légalement adopté. Ma mère ne m’a pas confié à une autre famille. Néanmoins, je me suis longtemps considéré comme « émotionnellement adopté ». Comme un adopté, je ne connais pas mes racines. Enfant, j’ai vécu avec des secrets et des mensonges. Adolescent, je me suis construit une identité confuse. En tant qu’adulte, je ressens de la colère devant le pouvoir de l’institution arrogante qui me refuse l’accès à ma propre généalogie.

Comment me décrire et qui suis je ? Il n’y a aucun qualificatif satisfaisant pour décrire des personnes comme moi. Aux USA, le corps médical nous avait étiquetés « AID children » abréviation de « issus d’insémination artificielle par donneur ». Puis nous sommes devenus « DI children » pour éviter la confusion terrifiante avec les initiales AIDS du SIDA. Encore plus tard, nous sommes devenus « les progénitures » et finalement des « issus des techniques d’aide médicales à la procréation » ou « bébés éprouvettes » ou même « sperms ». Toutes ces étiquettes ont contribué à nous déshumaniser, à nous classer dans un groupe d’individus à part, dont les droits fondamentaux sont bafoués. Je veux crier comme Elephant Man « je suis un être humain »!

La vérité de ma conception m’a été dévoilée à 37 ans, quelques jours après la mort de mon plus jeune frère, issu lui aussi d’un don de sperme. Mon père était décédé un an plus tôt.
Un gynécologue expert en infertilité, avait à l’époque convaincu mes parents que je n’avais pas besoin de savoir la vérité, que je ne suspecterai jamais ce secret de paternité, et que le donneur devait rester anonyme pour toujours.
Alors, mes parents qui souffraient déjà de leur infertilité ont porté ce secret : un lourd fardeau bien inutile. Ils ont sincèrement cru nous protéger, moi et mes deux autres frères conçus par des DI.

Après avoir passé de longues années à essayer de persuader le corps médical de la légitimité de notre besoin d’origine, nous avons admis que seuls, nous n’y parviendrions jamais. Alors nous avons alerté les médias, et sans relâche, nous avons été à la télévision, avons fait des émissions de radio, parlé avec des journalistes de la presse écrite, participé aux groupes de soutien d’infertilité et aux conférences médicales.

Notre but est de persuader l’opinion de la similitude entre notre situation et celle des adoptés :
nous ne portons, certes, pas la douleur de l’abandon mais comme les adoptés, nous voulons être libre de pouvoir connaître nos origines.