Alain MILON

Alain MILON

« On compte environ 50 000 enfants nés d’une insémination avec donneur depuis le début de cette pratique, en 1976. En moyenne, chaque année, 1 200 enfants naissent selon cette méthode, et on compte 750 donneurs, avec une part un peu plus importante d’hommes que de femmes. La commission des affaires sociales a rétabli l’intitulé du titre V, supprimé par l’Assemblée nationale, dans une rédaction qui n’est pas exactement celle du projet initial du Gouvernement. Elle a fait le choix de passer, en matière de don de gamètes, à un système de responsabilité éthique qui, je le souligne, n’entraîne en aucun cas un régime de responsabilité juridique. Notre texte permet à l’enfant devenu majeur d’obtenir à sa demande la levée de l’anonymat du ou des donneurs de gamètes sans que ceux-ci puissent s’y opposer. Selon nous, une telle solution est la plus claire et la plus responsable. L’égalité sera totale entre ceux qui pourront obtenir la levée de l’anonymat et les autres. La levée de l’anonymat sera un droit pour les enfants nés du don ; les donneurs comme les parents en auront été informés dès l’origine. En effet, ce système ne fonctionnera que si tous les donneurs sont informés au moment du don de la possibilité pour les enfants qui en naîtront de demander à connaître leur identité. Il s’agit donc de mettre en place une information systématique pour les futurs donneurs. La commission propose que cette information entre en vigueur à partir du 1er janvier 2013 et que la levée de l’anonymat prenne effet lorsque les enfants nés à partir du 1er janvier 2014 atteindront leur majorité, à condition qu’ils le souhaitent, c'est-à-dire en 2032. Ce système est plus simple et, me semble-t-il, plus sain que celui que le Gouvernement envisageait initialement. En effet, l’obligation d’obtenir le consentement du donneur dix-huit ans ou plus après son don imposait de le retrouver, au prix de procédures lourdes et contraignantes, pour que la commission chargée d’instruire la demande de levée d’anonymat puisse accéder à l’ensemble des données publiques permettant de retrouver le donneur. En pratique, cela aurait abouti, si le donneur était d'accord pour la levée de l’anonymat, à l’organisation d’une rencontre, ce qui ne me semble pas nécessairement souhaitable. Mieux vaut que la levée de l’anonymat soit prévue dès l’origine et que la recherche du donneur n’incombe pas à l’État. Je pense que la possibilité de levée de l’anonymat et la communication du nom du donneur et des caractéristiques qu’il aura indiquées lors du don, par exemple son âge ou sa profession, suffiront dans la majorité des cas. Certes, un tel système change le rapport au don. Certains craignent que la levée de l’anonymat ne fasse diminuer le nombre de dons, au moment où des couples vont déjà chercher des gamètes à l’étranger, par exemple en Espagne. Mais le cas du Royaume-Uni est éloquent. La levée de l’anonymat y a été rendue obligatoire, et le nombre de donneurs n’a pas chuté ; c’est leur profil qui a changé : il s’agit de personnes plus âgées, plus responsables, assumant pleinement le don qu’elles effectuent. En effet – et c’est là le fond de l’affaire –, compte tenu de l’évolution du droit et des mœurs, on ne peut plus prétendre que le gamète est un simple produit thérapeutique destiné à pallier la stérilité d’un couple. L’accès aux origines est reconnu par les conventions internationales et il ne constitue pas une volonté de « biologiser » la filiation. Pour les cas auxquels je pense, qui resteront minoritaires, l’essentiel est plutôt le fait de savoir que l’on est non pas un produit de la science, mais bien issu de personnes humaines. Les parents resteront libres de décider s’ils disent ou non la vérité à leurs enfants. De ce point de vue, le travail des centres d’études et de conservation des œufs et du sperme, les CECOS, a beaucoup évolué. Ils accompagnent les familles pour les aider à assumer la vérité de la technique de conception. Contrairement à ce que l’on a pu entendre, la levée de l’anonymat en Suède ne s’est pas traduite par une augmentation du secret. Les parents suédois disent davantage à leurs enfants la vérité sur leurs origines que les Français, comme le montre l’étude publiée par les chercheurs suédois le 5 janvier dernier. Ainsi, avec le système proposé, les donneurs donneront en toute connaissance de cause, et les enfants devenus majeurs auront le droit de savoir. Enfin, les centres qui pratiquent l’insémination avec tiers donneur craignent que la levée de l’anonymat n’entraîne une mise en cause future de la responsabilité, car ce sont eux qui choisissent d’apparier donneurs et couples receveurs. À mes yeux, il y a effectivement un problème dans la détermination des critères de choix du donneur par les médecins. Le sujet est trop sensible pour être laissé à l’initiative de chaque équipe. Il faut désormais un référentiel clair, afin d’éviter tout arbitraire et toute irruption du « donneur à la carte », comme aux États-Unis. C’est l’objet de l’article 18 ter adopté par la commission. (Mme Monique Cerisier-ben Guiga et M. Jean-Pierre Michel applaudissent.) » Source : séance  au Sénat du 7 avril 2011 (révision bioéthique) http://www.senat.fr/seances/s201104/s20110407/s20110407_mono.html
Alain MILON
Sénateur UMP

« On compte environ 50 000 enfants nés d’une insémination avec donneur depuis le début de cette pratique, en 1976. En moyenne, chaque année, 1 200 enfants naissent selon cette méthode, et on compte 750 donneurs, avec une part un peu plus importante d’hommes que de femmes.

La commission des affaires sociales a rétabli l’intitulé du titre V, supprimé par l’Assemblée nationale, dans une rédaction qui n’est pas exactement celle du projet initial du Gouvernement. Elle a fait le choix de passer, en matière de don de gamètes, à un système de responsabilité éthique qui, je le souligne, n’entraîne en aucun cas un régime de responsabilité juridique.

Notre texte permet à l’enfant devenu majeur d’obtenir à sa demande la levée de l’anonymat du ou des donneurs de gamètes sans que ceux-ci puissent s’y opposer.

Selon nous, une telle solution est la plus claire et la plus responsable.

L’égalité sera totale entre ceux qui pourront obtenir la levée de l’anonymat et les autres. La levée de l’anonymat sera un droit pour les enfants nés du don ; les donneurs comme les parents en auront été informés dès l’origine. En effet, ce système ne fonctionnera que si tous les donneurs sont informés au moment du don de la possibilité pour les enfants qui en naîtront de demander à connaître leur identité.

Il s’agit donc de mettre en place une information systématique pour les futurs donneurs. La commission propose que cette information entre en vigueur à partir du 1er janvier 2013 et que la levée de l’anonymat prenne effet lorsque les enfants nés à partir du 1er janvier 2014 atteindront leur majorité, à condition qu’ils le souhaitent, c’est-à-dire en 2032.

Ce système est plus simple et, me semble-t-il, plus sain que celui que le Gouvernement envisageait initialement.

En effet, l’obligation d’obtenir le consentement du donneur dix-huit ans ou plus après son don imposait de le retrouver, au prix de procédures lourdes et contraignantes, pour que la commission chargée d’instruire la demande de levée d’anonymat puisse accéder à l’ensemble des données publiques permettant de retrouver le donneur. En pratique, cela aurait abouti, si le donneur était d’accord pour la levée de l’anonymat, à l’organisation d’une rencontre, ce qui ne me semble pas nécessairement souhaitable.

Mieux vaut que la levée de l’anonymat soit prévue dès l’origine et que la recherche du donneur n’incombe pas à l’État. Je pense que la possibilité de levée de l’anonymat et la communication du nom du donneur et des caractéristiques qu’il aura indiquées lors du don, par exemple son âge ou sa profession, suffiront dans la majorité des cas.

Certes, un tel système change le rapport au don. Certains craignent que la levée de l’anonymat ne fasse diminuer le nombre de dons, au moment où des couples vont déjà chercher des gamètes à l’étranger, par exemple en Espagne. Mais le cas du Royaume-Uni est éloquent. La levée de l’anonymat y a été rendue obligatoire, et le nombre de donneurs n’a pas chuté ; c’est leur profil qui a changé : il s’agit de personnes plus âgées, plus responsables, assumant pleinement le don qu’elles effectuent.

En effet – et c’est là le fond de l’affaire –, compte tenu de l’évolution du droit et des mœurs, on ne peut plus prétendre que le gamète est un simple produit thérapeutique destiné à pallier la stérilité d’un couple. L’accès aux origines est reconnu par les conventions internationales et il ne constitue pas une volonté de « biologiser » la filiation.

Pour les cas auxquels je pense, qui resteront minoritaires, l’essentiel est plutôt le fait de savoir que l’on est non pas un produit de la science, mais bien issu de personnes humaines.

Les parents resteront libres de décider s’ils disent ou non la vérité à leurs enfants.

De ce point de vue, le travail des centres d’études et de conservation des œufs et du sperme, les CECOS, a beaucoup évolué. Ils accompagnent les familles pour les aider à assumer la vérité de la technique de conception.

Contrairement à ce que l’on a pu entendre, la levée de l’anonymat en Suède ne s’est pas traduite par une augmentation du secret. Les parents suédois disent davantage à leurs enfants la vérité sur leurs origines que les Français, comme le montre l’étude publiée par les chercheurs suédois le 5 janvier dernier.

Ainsi, avec le système proposé, les donneurs donneront en toute connaissance de cause, et les enfants devenus majeurs auront le droit de savoir.

Enfin, les centres qui pratiquent l’insémination avec tiers donneur craignent que la levée de l’anonymat n’entraîne une mise en cause future de la responsabilité, car ce sont eux qui choisissent d’apparier donneurs et couples receveurs.

À mes yeux, il y a effectivement un problème dans la détermination des critères de choix du donneur par les médecins. Le sujet est trop sensible pour être laissé à l’initiative de chaque équipe. Il faut désormais un référentiel clair, afin d’éviter tout arbitraire et toute irruption du « donneur à la carte », comme aux États-Unis. C’est l’objet de l’article 18 ter adopté par la commission. (Mme Monique Cerisier-ben Guiga et M. Jean-Pierre Michel applaudissent.) »

Source : séance au Sénat du 7 avril 2011 (révision bioéthique)

http://www.senat.fr/seances/s201104/s20110407/s20110407_mono.html